Catherine, technicienne chimie process
- Catégorie
- Nos métiers
- Temps de lecture
- 7 min de lecture

Scannez ce QR code pour lire l’article sur votre téléphone.
Fascinée depuis toujours par le monde des bactéries, Catherine les observe avec admiration pour leur incroyable capacité d'adaptation. Pourtant, dans notre laboratoire de Fleurus, son métier consiste à traquer et éradiquer cet infiniment petit pour protéger quelque chose de bien plus grand : notre santé.
Ce photoreportage ne reflète bien sûr pas l'ensemble des missions dévolues aux techniciens chimie process de notre laboratoire de Fleurus. Ce n'est pas le but de cette série mensuelle Une journée avec... Nous avons observé Catherine pendant toute une journée de travail, prise au hasard. Voici comment elle s'est déroulée...
7h37

Catherine extrait du réfrigérateur à 4° les 75 premiers milieux de culture à analyser. Au premier abord, les bactéries intimident, car elles menacent parfois notre vie. Mais heureusement, celles qui sont nuisibles ne constituent qu’une petite minorité de la kyrielle présente sur notre planète. Quand on porte attention à leur diversité de formes, de couleurs, de fonctions, d’aptitudes et de bienfaits, la peur peut vite se muer en éblouissement...
En savoir plus sur les milieux de culture8h35

Lecture de plaques IDEXX remplies d’un échantillon d’eau brute auquel un réactif avait été préalablement ajouté. Elles permettent de détecter la présence ou l’absence de coliformes totaux ou de Escherichia coli (E. coli) dans l'eau. Le principe de fonctionnement est basé sur des réactions enzymatiques ou biochimiques qui produisent des changements visibles, comme un changement de couleur, si les bactéries ciblées sont présentes. Cela permet à Catherine de détecter des contaminants au premier coup d’œil sans avoir besoin d'analyses plus complexes ou plus longues.
9h48

Dans ce métier, où la moindre rature doit être justifiée, tout doit être tracé, minuté, répertorié, comparé. Chaque étape suit des règles strictes et impératives, assurant ainsi l'exactitude du processus. Par exemple les eaux brutes (celles que l'on retrouve à l'état naturel avant captage) et les eaux traitées (celles que l'on retrouve au robinet des consommateurs) ne sont pas analysées dans le même local afin d’éviter les contaminations croisées.
10h10

Alors qu’un préleveur s’en va récolter des échantillons qui seront analysés le lendemain, la laborantine encode des résultats. Pour 10h45, ils doivent tous être transmis afin de permettre au service de planification de programmer de nouveaux prélèvements urgents en cas de détection de non-conformités. Toutes les heures de lecture d’incubation doivent être notées afin de respecter la norme d’accréditation du labo ISO 17025. Bien que fastidieuse, cette norme internationale pour les laboratoires établit les exigences générales de compétence, d'impartialité et de cohérence des activités. Elle contribue à garantir l'exactitude et la fiabilité absolue des résultats.
En savoir plus sur la norme ISO 1702511h02

Afin d’obtenir confirmation de ses résultats, Catherine avait remis en incubation deux heures durant les bactéries trouvées au premier test. L’incubateur, qui a des airs de tropiques métalliques, favorise le développement des micro-organismes en les protégeant contre les changements intempestifs de température, d'humidité, d'oxygène et de CO2. La puéricultrice de ces bébés organismes les avait préalablement nourris avec « de la nourriture qu’ils aiment bien », soit du milieu Slanetz & Bartley, une « tuerie de micro-panade » habituellement employée en microbiologie pour la culture et l'identification des Entérocoques.
En savoir plus sur les entérocoques11h29

Alors qu’on en venait à peine à s’extasier comme elle devant l'esthétique que révèle cette culture microbienne, Catherine nous rappelle que nous sommes en face d’Entérocoques fécaux qui peuvent causer des maladies ou des infections mortelles chez l'homme. Il est donc crucial de les éliminer afin de rendre l’eau potable. Il existe plusieurs moyens de se débarrasser des bactéries tels que la chloration, la désinfection aux ultraviolets, le traitement à l'ozone et les filtres à charbon actif.
En savoir plus sur la culture microbienne11h48

Les boîtes de Petri ont parlé. La colonie bactérienne repérée, il faut compter les individus. Si le laboratoire de Fleurus est doté d’équipements dernier cri pour analyser l’eau, une grosse loupe reste utile pour le dénombrement. Catherine note, catégorise, enregistre les résultats qui seront communiqués au secteur d'où provient l'échantillon prélevé. Elle nous parle du danger des Clostridium perfringens ou des Escherichia coli sans haine pour l’ennemi. Elle reste convaincue de l’intérêt majeur des bactéries pour notre société et notre environnement.
Chez moi je ne bois que de l’eau du robinet

13h03

La vie professionnelle de Catherine est sous le diktat permanent du temps. Pour se rappeler précisément des actions à réaliser, elle se programme toutes sortes d’alarmes. L'heure est très importante pour assurer le suivi des analyses.
13h13

Les contraintes liées au temps et à la précision des analyses sont évidemment sources de stress pour le personnel du laboratoire. Rigoureuse, Catherine redoute les embouteillages matinaux sur la route qui la conduit à Fleurus car certains milieux ayant incubé la nuit doivent être ouverts dans des délais impartis. Les stratégies de gestion du temps et des priorités sont sa routine.
13h34

La gestion des déchets d’un laboratoire nécessite une logistique particulière. Le personnel d’entretien ne s’occupe pas des poubelles. C’est un aspect essentiel de la sécurité et de la protection de l'environnement.
14h11

Destruction du matériel biologique par autoclave, stérilisateur à la vapeur. Les déchets biologiques comme le matériel de culture bactérienne ou les cultures de micro-organismes doivent être éliminés en respectant des normes strictes. L'action conjuguée de la vapeur d'eau sous pression et de la température (supérieure à 120°C) provoque la dénaturation et la destruction totale des agents qui pourraient être infectieux.
14h25

Analyse d’échantillons d’eau de distribution sur une rampe de filtration préalablement passée sous le bec Bunsen afin de garantir un environnement aseptisé. La membrane de filtration est ensuite déposée sur un milieu de culture pour développer les bactéries spécifiques. Catherine n’est absolument pas émoussée par la routine de ses interventions même si c’est toujours la même chose qu’elle recherche. Elle dit que « les bactéries sont ses tamagotchis perpétuels ».
15h18

De piquet le lendemain samedi, Joël étudiera les incubations de la nuit préparées par Catherine. Un week-end en tête à tête avec des êtres microscopiques s’annonce pour cet analyste chimie process à la cellule prélèvement car le labo ne s’arrête jamais. La très grande majorité des bactéries mesurent en moyenne d’un à cinq micromètres (des millièmes de millimètre).
15h47

Catherine quitte le labo. Elle s’en va rejoindre Mademoiselle, sa chatte angora et Alain son compagnon. Sportive, elle pratique assidument le vélo de route (elle a gravi le Mont Ventoux) et le VTT à Ophain-Bois-Seigneur-Isaac. Elle se réjouit du retour annoncé des beaux jours pour passer de ses gants stériles en latex à ceux en cuir de son équipement de motarde. Son cœur battant déjà au rythme du vent et des paysages infiniment grands qu’elle retrouvera dès que l’hiver cédera sa place au printemps, impatiente de sentir la liberté de la route sous les roues de sa Honda Shadow VT 750 bleue et unique au monde.
Et une petite anecdote pour conclure...
Catherine est entrée en service en 1998. Un matin des années 2000, trois messieurs venus tout droit de France débarquent à Fleurus pour une visite du laboratoire et une formation à de nouvelles techniques. En attendant le directeur, ils s’étaient retrouvés dans la cafétéria, autour de la machine à café. Les hommes, bruyants comme un torrent en crue, ne manquaient pas de se vanter. « Nous, en France, on est les meilleurs dans notre domaine, tu vois ? On gère ! ». Et, bien sûr, ils tutoyaient Catherine comme si elle était une stagiaire, sans même lui laisser une chance de se présenter.
Lorsque le directeur du labo fit son apparition, l’ambiance passa en un clin d'œil de la fête du bruit à la messe silencieuse. La pièce se figea. Les trois hommes, à la voix si forte s’étaient soudainement transformés en cascade gelée. Le directeur leur donna la présentation de rigueur, avant de conclure : « Je vous laisse maintenant avec Catherine, notre technicienne, qui va vous donner la formation que vous avez sollicitée ». Et là, comme un souffle de vent glacé, un silence abyssal s’installa. Les trois visiteurs semblaient tout à coup aussi mal à l’aise qu'un poisson hors de l’eau brute. Tandis que Catherine les emmenait au labo, non sans un petit sourire en coin qu’ils ne pouvaient voir, seuls leurs pas bruissaient sur le carrelage. À ce moment précis, les trois messieurs avaient l’air d’avoir appris en Belgique une chose essentielle : mieux vaut parfois se taire et écouter... surtout quand c’est Catherine qui prend les commandes !