Recherche de fuite grâce à des chiens renifleurs : pour ou contre ?
- Catégorie
- Nos projets
- Temps de lecture
- 5 min de lecture
Scannez ce QR code pour lire l’article sur votre téléphone.
Sur la piste de nouvelles méthodes de recherche de fuite pour compléter l'arsenal déjà à disposition, il ne faut pas nécessairement faire appel à des technologies de pointe. La preuve par ces chiens dont la truffe vaut tous les outils de détection du monde. Déjà utilisés pour confondre les trafiquants de drogue ou retrouver des personnes ensevelies sous des décombres, les Sherlock Holmes à quatre pattes peuvent aussi débusquer des fuites sur canalisation. Mais comment font-ils ? Réponse dans ce reportage.
Perchée sur son pas de porte, une brave dame s’inquiète du remue-ménage qui règne dans la rue. Plusieurs camionnettes de la SWDE ont réussi à se garer vaille que vaille entre chaussée et trottoir. Mais un véhicule retient plus particulièrement son attention. Il est immatriculé en France. Et, de l’arrière jaillit un quatuor de chiens turbulents plutôt pressés de se dégourdir les pattes. Enhardie par les sourires, elle s’approche du groupe pour en savoir un peu plus. « Vous faites quoi ? », demande-t-elle. « On recherche les fuites », lui répond Philippe, le chef exploitation réseaux de Charleroi. « Avec des chiens ? Vous rigolez ! C’est pour la caméra cachée ou quoi ? ». Et bien non. Cette tranche de vie est bien réelle.
Du 6 au 10 novembre dernier, plusieurs équipes en charge du diagnostic de nos réseaux ont participé à une chasse aux fuites. Dans nos rues et campagnes wallonnes, elles ont suivi cette meute de fins limiers au flair délicat et leurs maîtres-chiens, venus expressément de France pour démontrer leur savoir-faire.
« Le recours aux chiens renifleurs est une solution qui a émergé lors d’une de nos précédentes éditions du programme Nos idées ont de la valeur, explique Sigrid, coordinatrice de projets à la SWDE. Nous avions déjà exploré plusieurs pistes prometteuses pour la recherche de fuites – dont l’induction électromagnétique et la détection par satellite – mais il rester encore à expérimenter celle des chiens renifleurs . Pour tester l’efficacité de cette solution, nous avons sélectionné plusieurs secteurs spécifiques où des fuites présumées ont été repérées par nos outils de monitoring, mais que nous ne patrvenions pas à localiser via les technologies classiques ».
C'est ainsi que, durant 5 jours, des chiens ont été mis à contribution pour "renifler" la fuite sur des lignes de canalisations du côté de Nisramont, Stavelot, Ligny et Loverval.
Une truffe sensible aux odeurs de chlore
Pour leur dernière sortie du côté de Loverval (Gerpinnes), les chiens sont confrontés à des conditions climatiques plutôt compliquées. La drache incessante alourdit la glaise des champs et la progression des équipes se fait pénible. Nathalie Delon et François Bourdeau, les deux maîtres-chiens de K9-Kyroc-Team n’en ont cure. Ce sont d’anciens militaires qui en ont vu d’autres.
« Avant de nous consacrer à la recherche de fuites, nous étions spécialisés dans la recherche de personnes et d’explosifs, explique François. Techniquement, le concept reste le même pour les chiens. Plutôt que de détecter l’odeur d’individus sous des éboulis, d’explosifs dans un entrepôt ou de stupéfiants dans une valise, les chiens sont dressés pour repérer le chlore présent dans l’eau de distribution. Lorsque l’eau fuit d’une conduite, les vapeurs de chlore remontent à la surface. Elles peuvent être décelées par des chiens bien entraînés. Pour eux, c’est avant tout une séance de jeu qui ne va pas durer plus d’une demi-heure. Pour enclencher la recherche, nous leur faisons sentir un peu d’eau du robinet (celle qui circule dans les conduites à tester). Ils se mettent alors à arpenter la zone le long de la conduite. Si le chien flaire une odeur de chlore, il marque l’endroit en se couchant ou en s’asseyant. On sait alors qu’il y a une fuite à quelques mètres près. Et les équipes de terrain peuvent creuser pour la trouver ».
Recherche en pleine campagne
Il est vrai que ces « nez sur pattes » sont plutôt efficaces. Ils ont marqué à plusieurs reprises lors de notre sortie. Une première fois sur un regard d’adduction (là où l’eau circulait à l’air libre en sous-sol) et d’autres fois en pleine nature. En milieu urbain, le petit beagle de la bande a même détecté une fuite là où personne ne l’attendait. Pour la plus grande joie de sa maîtresse Nathalie.
« Dans les agglomérations, le recours aux chiens renifleurs est moins pertinent, a constaté Sigrid, car nos équipes utilisent des moyens acoustiques qui sont relativement efficaces. Leurs interventions sont par contre appréciées sur les zones équipées de conduites en polyéthylène qui transmettent moins bien le son en cas de fuite ».
Une solution miracle ?
Si le concept de « chien renifleur » a tout pour séduire, sa mise en pratique nécessite quelques ajustements. Car, dans la pratique, il n’est pas envisageable de creuser systématiquement là où les chiens ont marqué.
« Le problème de ce système de détection, c’est qu’il ne s’appuie pas sur des critères quantitatifs, poursuit Sigrid. Qu’il y ait une grosse fuite ou une petite fissure sur le joint d’une conduite, le chien va marquer de la même manière parce qu’il sent la présence de chlore. Cet aspect doit encore être affiné. Sans compter que les équipages de chiens doivent être disponibles en cas de besoin. Comme la société est basée au Sud de la France, nous devons être certains qu’elle sera réactive »
Si les résultats de cette semaine de tests avec les chiens s’avèrent concluants et rentables, le dossier sera confié aux équipes chargées des recherches de fuites du Processus Exploitation. Elles en feront peut-être l’un de leurs outils d’investigation. Affaire à suivre donc…