Une fois par an, Olivier est un Saint
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C'est peu dire qu'Olivier Tournay attend avec impatience le dimanche de la Trinité. Ce jour-là, il est la personnalité la plus en vue de sa ville. Car à Mons, c'est Ducasse. Sur la Grand-Place bourrée de monde, il est celui qui terrasse le Dragon d'un dernier coup de pistolet. Depuis 2010, notre collègue incarne Saint-Georges, le héros du Combat dit Lumeçon, moment-phare du Doudou. Et cette année, c'est le 26 mai !
« Ça fait maintenant trois générations que ma famille est inscrite au palmarès des Saint-Georges, raconte Olivier, fontainier Exploitation Diagnostic réseau à Frameries. L’histoire a commencé dans les années ‘50 avec mon grand-père Aramis. À l’époque, il était jeune jockey professionnel quand le Saint-Georges du moment lui a demandé de prendre sa succession. Il n'avait n'avait pas de descendant (le rôle de Saint-Georges est traditionnellement transmis de père en fils - ndlr). Mon grand-père était pour lui la personne de idéale pour reprendre le flambeau. ».
Quatre de suite
C'est la septantième année consécutive que le rôle principal du Lumeçon est tenu par un Tournay. Olivier est le quatrième du nom. Pourtant il a bien failli ne jamais revêtir le prestigieux costume du saint cavalier : . « En 1984, mon père a refusé de reprendre le rôle de Saint-Georges.Il a passé la main à son frère aîné. Pour moi, c’était une catastrophe ! Je rêvais depuis toujours être le Saint-Georges de la ville. Et d’un coup, on m’annonçait que le Saint-Georges de la troisième génération ne serait pas moi, mais mon cousin Frédéric ».
Concours de circonstance : le fils dudit cousin Frédéric n'est pas partant pour succéder à son père. Saint-Georges de 1999 à 2009, Frédéric démissionne et demande alors à Olivier de reprendre le rôle. « Je n’ai bien sûr pas hésité une seule seconde. Comme je faisais partie des 11 Diables depuis des années, je répondais à toutes les conditions pour accéder au titre de Saint-Georges en 2010 ».
On ne rigole pas avec le protocole
Fini les guindailles du Doudou avec ses copains Diables ! « Quand j’ai repris le rôle de Saint-Georges, tout est devenu plus sérieux car Saint-Georges est tenu de suivre un protocole très rigoureux. J’ai commencé par éduquer le cheval qui m’était confié par la ville de Mons. Plusieurs fois par semaine, je l’habituais aux bruits des clochettes, aux mouvements des acteurs, aux cris de la foule, aux coups de feu intempestifs. Je me suis moi-même entrainé plus dur pour améliorer ma condition physique ».
Pour Olivier, la Ducasse commence officiellement le samedi avec la descente de la Châsse et l’intronisation de Saint-Georges dans la cour de l’Hôtel de ville. Il y reçoit sa lance, son sabre et le pistolet qui vont lui permettre d'en finir avec el Biète, comme disent les Montois. « Le dimanche de la Trinité, je me lève à 4h00 du matin. Ma tante et ma cousine préparent Condé, mon cheval qui a droit à une douche et un bon coup de brosse. Elles accrochent ensuite les pompons porte-bonheur que Laurence, mon épouse a fabriqués. Et moi, je me charge de fixer le caparaçon et la selle ».
La journée chargée de Saint-Georges
Après le petit-déjeûner, les acteurs du Lumeçon vont chercher le Dragon qui sommeille dans les sous-sols de la Collégiale Sainte-Waudru pour le cacher au Théâtre de Mons, sur la Grand-Place. Il y restera là jusqu'au combat.
Olivier –Saint-Georges– retourne à la Cathédrale pour participer à la Procession dont l'épilogue est la Montée du Car d'Or. « Il est 9 heures. C’est le moment où j’entre à cheval dans la Collégiale pour recevoir le sceau de Sainte-Waudru des mains du Doyen. C’est le porte-bonheur qui va me permettre de vaincre le dragon. Après la messe, la châsse de Sainte-Waudru est installée sur un char d'apparat, le Car d'Or, pour circuler dans la ville. Nous sommes plus d'un millier à défiler en costumes d'époque. À la fin de cette procession, c'est moi qui donne le signal pour que l’attelage qui tire le Car d'Or entame la montée de la rampe pavée qui rejoint la Collégiale ».
Notre article sur Laurence, l'épouse de Saint-GeorgesLa légende dit que si le Car d'Or ne gravit pas la rampe Sainte-Waudru d'une seule traite, un grand malheur s'abattra sur la ville
Dans le programme, le fameux Combat dit Lumeçon suit la Montée du Car d'Or aux environs de 12h30. Olivier, avec son personnage de Saint-Georges, est la pièce-maîtresse d'une chorégraphie d'une bonne trentaine de minutes où Diables et Chins-Chins, Hommes blancs et Hommes de Feuilles, Pompiers, Policiers en casques blancs ou bleus tournoient autour du Dragon, sur le rythme du son frénétique du Doudou. Les spectateurs qui se pressent contre la corde qui délimitent le Rond tentent d'arracher un crin à la queue du Dragon, pour leur porter chance...
Tout savoir sur le Doudou (Wikipedia)L'après combat
Quand l'Biète est morte, Dame Cybèle (qui représente Sainte-Waudru) et Dame Poliade (la cité de Mons) raccompagnent Saint-Georges jusqu’à l’Hôtel de Ville. Le temps de prendre une douche, de se changer et de bichonner son cheval, Olivier/Saint-Georges se rend ensuite en divers endroits de la ville pour rencontrer les autorités locales (bourgmestre, gouverneur, etc.). Invariablement, ce dimanche hautement festif de la Trinité s’achève par un plantureux repas qui réunit tous les acteurs et actrices du combat ainsi que leurs moitiés.
A peine remis de la Ducasse, Olivier rempile le week-end suivant avec le Petit Doudou. Celui pour les enfants : « Pour l’occasion, je suis metteur en scène. J’ai rangé mes armes et mon costume et je supervise le combat mené entre un Dragon miniature et le petit Saint-Georges ». Pour la petite histoire, Victor, le fils d’Olivier et Laurence, a tenu ce rôle durant des années. Désormais intégré dans la fameuse bande des Diables, il y a fort à parier qu’il prendra la succession de son paternel. Histoire de famille à suivre...